20 déc. 2009

Tendance: du karité sous le sapin

En tête de la liste des 10 cadeaux de l’année de Marie-Claude Lortie, columnist de l’art de vivre pour La Presse de Montréal, se retrouvent de petits pots de karité de l’Occitane. Comme vous avez pu le constater dans un texte précédent, ce karité provient de la Coopérative de Léo au Burkina Faso où j’ai eu l’occasion d’intervenir. Une belle publicité, mais encore plus, un signe que le karité est tendance et a de beaux jours devant lui.

http://www.cyberpresse.ca/noel/200912/18/01-932275-lannee-de-marie-claude-lortie-en-10-cadeaux.php

J’ai eu l’occasion de parler avec Maud REBOUL, responsable des Ingrédients & filières durables à l'occitane, et j’ai pu constater que pour eux la relation avec la coopérative est plus qu’une relation d’affaire. C’est un partenariat à long terme. Entre autres, leur fondation a permis de construire la garderie de la Coop. Ils sont prêts à s’impliquer pour de futurs projets afin de maximiser les retombées en Afrique de leurs importations. Un beau modèle porteur d’espoir.

C’est donc une belle suggestion de cadeau pour Noël. Je profite de l’occasion pour vous transmettre mes meilleurs vœux pour cette période de l’année si spéciale.

Je veux également vous remercier pour votre attention à mes publications. Cette semaine, mon blogue a reçu sa 2,000ième visite. Les ¾ étaient du Canada. Les autres venaient de 35 pays répartis sur quatre continents. Le monde change, les cadeaux de Noël aussi !
Posted by Picasa

18 déc. 2009

Solaire solidaire: les résultats du test

Voici surement le moment de cette semaine historique que vous attendiez tous avec impatience. Pas le résultat de la conclusion de la conférence de Copenhague, mais bien celui de notre test de déshydrateur solaire et solidaire. Pour faire local, nous allons lui donner l’acronyme de DSS. Tout d’abord, quelques explications. La torréfaction a pour but de diminuer l’humidité contenue dans les amandes de karité concassées. Contrairement au café, cette opération n’ajoute rien au goût. Au contraire, les arômes de brulé sont indésirables pour un produit que l’on destine à se mettre sur la peau. À moins qu’une mode de parfum style « saumon boucané » se décide à traverser l’occident. Ce qui ne semble pas le cas pour le moment.

Lorsque les amandes sortent du concasseur, elles renferment autour de 35 % d’humidité. Après le passage au torréfacteur de taux va diminuer de moitié à 17 %. Nous avons placé des amandes broyées dans notre DSS. En une heure le taux d’humidité est descendu à moins de 20% et il a continué à descendre très lentement par après (voir le tableau). Donc c’est un succès et plus rapide que nous l’espérions. Comme disent les chinois : « over expectation ». Bravo !

C’est une bonne nouvelles pour plusieurs raisons. Le fait de doter les centres de production de déshydrateurs solaires, leur permettra également d’y sécher les noix au moment de la récolte. C’est une étape problématique pour la transformation du karité car elle a lieu pendant la saison des pluies. Le soleil y est généreux, mais de violentes averses obligent les productrices à se tenir sur le guet pour mettre leur noix à l’abri au moment où elles sont lourdement sollicitées par leurs différentes récoltes.

Le fait de ne pas utiliser le bois pour torréfier les amandes va également alléger la pression sur la ressource. Ceci est d’autant plus important qu’une des sources de ce combustible est justement l’arbre à karité. Or celui-ci a besoin d’une trentaine d’année avant d’être productif. L’apparition massive de déshydrateur solaire dans un lieu où le soleil est particulièrement généreux pourrait amener la multiplication d’applications bénéfiques pour l’environnement et pour les populations qui y vivent. Solaire et solidaire…
Posted by Picasa

14 déc. 2009

Un déshydrateur solaire

Dans le petit monde du karité, il y a quelques sujets à polémiques et qui permettent aux initiés de meubler leurs conversations. Par exemple, est-ce que l’avenir du karité est dans l’exportation ou bien dans le marché local et régional ? Un autre sujet est la question de la torréfaction. Selon la méthode traditionnelle le karité, avant d’être baraté, est torréfié afin de réduire le taux d’humidité. L’eau oxyde le produit et augmente le taux d’acidité. Or, la torréfaction a plusieurs inconvénients. D’une part, elle laisse un arrière goût désagréable au beurre. Ensuite, la température atteint lors du processus dépasse souvent le seuil tolérable qui affecte les fragiles combinaisons chimiques.

Pour enlever l’humidité indésirable, l’utilisation du soleil dans des pays où il est omniprésent presque toute l’année a un certain sens. Ceci fait réaliser qu’ici, autant le soleil est présent, autant les capteurs solaires sont rares. Dur rappel du manque de fond chronique qui paralyse tout.

Pour revenir au karité, au Mali certaines expériences de déshydratation solaire ont été tentées avec succès. Quand j’ai fait part de l’idée à Abou, il a d’abord été réticent mais il a rapidement changé d’idée lorsqu’il a constaté que la température de deux torréfactions dépassait nettement les standards. Comme j’avais auparavant trouvé un plan d’un déshydrateur solaire, je me suis retrouvé à l’atelier de Justin Nebie pour construire un prototype.

L’atelier est rudimentaire et le coffre à outils est l’avenant. Les tournevis sont rongés par l’usure, les mesures des mètres (tapes à mesurer) sont effacées par les innombrables va et vient qu’ils ont subis, les têtes des deux marteaux cherchent à s’envoler, mais les scies sont bien affutées et font le travail. Le seul appareil électrique est une scie sauteuse chinoise que l’on doit huiler régulièrement. Justin travaille comme un chirurgien. Il est entouré de quatre apprentis qui sont tout à son service. Comme tout groupe ici, ils sont nettement hiérarchisés du plus vieux au plus jeune et leur rôle et les tâches qu’ils vont assumer sont en conséquences. Ils tiennent outils et pièces de bois qu’ils vont passer au maître lorsqu’il en fait la demande. Aucun des apprentis ne parle français, ce qui en dit long sur leur niveau d’éducation. Mais ils sont attentifs au travail du menuisier qui fait preuve d’une grande maîtrise de son métier.

Heureusement, car le plan s’avère incomplet et très approximatif. Nous devons improviser et nous devons recommencer plusieurs étapes. La légendaire patience africaine ne fait pas défaut. Il n’y a que le québécois qui s’énerve et initie ses collègues aux jurons catholiques. Après les quelques tâtonnements du début, le travail avance rondement et le déshydrateur est livré la veille de mon départ. Au petit matin, nous l’installons et tout est prêt sauf… Le soleil. Il nous a plombé sur la tête et ce sans relâche depuis plus d’un mois et aujourd’hui il est absent. La nature a parfois le don de nous rappeler que c’est elle la grande patronne !

A suivre : les résultats du premier test
Voir aussi l’album-photo
Posted by Picasa

11 déc. 2009

De l'artisanat à l'industrialisation

Abou, le directeur de la Coop, m’attendais impatiemment avec un projet ambitieux : planifier une usine de transformation du Karité pour la coopérative dont il assume la direction. J’ai rencontré Abou à plusieurs reprises à Montréal et j’ai toujours été impressionné par son esprit entrepreneurial et créatif. Lui a été inspiré par l’usine de café Nelligan que j’ai mis sur pied. Les dés étaient lancés pour une collaboration internationale.

La coopérative, l’Union des Groupes de Production des Produits du Karité (UGPPK, l’Afrique est un terreau fertile pour les sigles incompréhensibles), regroupe 67 groupes villageois qui mobilisent 2,860 femmes. La Coop a été la première au monde à obtenir la certification équitable pour le karité. Elle mise depuis longtemps sur l’exportation et ce choix porte fruit. Ses ventes augmentent à un rythme affolant : en 2005 la Coop a vendu 56 tonnes de karité, en 2009 ce sera plus de 250 tonnes.

Le plan d’affaire actuellement en vigueur prévoit de décentraliser la production vers les centres locaux. Selon le modèle actuel, les productrices viennent au centre de production par unité villageoise avec leur noix et elles utilisent les facilités du centre pour les transformer en karité. La Coop leur achète le beurre qu’elles auront produit. C’est assez impressionnant de les voir aller car c’est un travail dur et très long. (Voir l’album-photo)

Or ce choix pose plusieurs problèmes. Tout d’abord, la difficulté de respecter les délais de livraison. Ils sont actuellement à préparer une commande de 100 tonnes de beurre de karité pour l’occitane Ensuite, il est difficile de prévoir la quantité d’amandes que vont fournir les productrices. Puis, la qualité est non homogène et les coûts de production sont plus élevés en mode artisanal (temps et bois). Finalement, l’augmentation de la production pose des problèmes environnementaux, les rejets d’eau usée et de pâte solide augmentent et on ne sait plus quoi en faire.

En fait, la coopérative est prise devant le choix de continuer ses opérations selon le mode actuel ou bien de passer à l’étape semi-industrielle. La transformation du karité en mode artisanal est une activité traditionnelle des femmes et elles détiennent un savoir-faire qui a été bonifié ces dernières années grâce à la formation et l’ajout d’équipement. Ainsi, la qualité du beurre s’est grandement améliorée. Toutefois, cette façon de faire demande énormément de travail et se fait dans des conditions difficiles. Les économies d’échelles étant limitées, l’amélioration des conditions de travail va rendre le produit non compétitif face aux entreprises qui exportent les amandes et les transforment dans de grandes usines situées à l’extérieur du pays. D’autre part, la production artisanale n’offre aucun avantage en ce qui concerne la qualité du produit final. Au contraire.

L’implantation d’une usine de transformation aurait pour effet de changer radicalement le mode de fonctionnement de la coopérative. Les productrices vendraient leurs amandes à la coopérative qui les transformeraient. L’usine va créer environ 25 emplois permanents. Plusieurs de ces emplois pourront être occupés par des productrices sur une base rotative, d’autres pourraient y trouver un emploi régulier après avoir suivi une formation et un entrainement. Les économies d’échelle qui seront réalisées pourraient être redistribuées en bonification du montant payé pour les amandes. Par ailleurs, des activités de deuxième transformation pourraient être développées en plus de celles du savon.

Un tel choix permettrait d’assurer à long-terme la survie de l’activité karité, de son expansion et de pouvoir garder sur place les activités de transformation génératrices de plus-value. Ce qu'il y a de bien dans cette histoire, c'est que ce sont les femmes productrices qui prendont elles-même la décision finale car ce sont elles qui siègent au Conseil d'administration de la coopérative.
Posted by Picasa

9 déc. 2009

UGPPK, la Coop de Léo au Burkina Faso

À une heure trente de route au sud de la capitale Ouagadougou et juste avant d’atteindre la frontière du Ghana se trouve la petite ville de Léo. Une quinzaine de milliers de personnes habitent cette petite ville modeste et tranquille. À l’entrée de la ville se trouve la coopérative des productrices de karité et un petit hôtel… vide. Ici, le tourisme ne sortira pas les gens de la misère. Un rapide coup d’œil au centre-ville ne laisse aucun doute sur le niveau de vie de la population locale.

La coopérative est en retrait de la route goudronnée et j’arrive en pleine période de pointe. Le plus grand client de la Coop, l’Occitane, vient de passer sa commande : 105 tonnes de beurre de karité. Une armée de femmes besogne du petit matin à la tombée de la nuit pour extraire le précieux beurre des amandes qu’elles ont récoltées au mois d’août. L’ambiance est sereine malgré la lourdeur de la tâche. Certaines sont au pilon. De nombreuses autres bouillent ou torréfient auprès de feu de bois dégageant une fumée abondante qui ajoute à la chaleur ambiante. Bien que nous soyons en saison « froide », le thermomètre atteint les 35 degrés. Celsius bien entendu !

En Afrique, qui dit femme dit enfants. Une garderie a été aménagée, mais la plupart tournent autour de leur mère. Les plus petits sont terrorisés au passage du géant blanc que je suis. Au contraire, d’autres m’offrent généreusement leur sourire plein de vie. De modestes, mais fonctionnels, bureaux accueillent le personnel administratif. Trois femmes s’occupent de l’administration, supervisées par Abou, le directeur général de l’organisation. Tout se beau monde est également à pied d’œuvre pendant de longues heures, comme s’ils voulaient éviter de circuler sous le soleil. Et ce, souvent 7 jours sur 7. Abou, m’a mentionné que depuis qu’il est en poste, en 2005, il n’a pris en tout et pour tout que 3 jours de congé. Trois. Dire qu’il y a des gens qui pensent que les Africains sont paresseux. Je les mets au défi de venir ici travailler une seule journée à la transformation du karité. Tant qu’à faire, au mois d’avril quand le thermomètre vient chatouiller les 45… à l’ombre bien entendu!
Pour en savoir plus, voir l'album photo
Demain: un beau projet
Posted by Picasa

1 déc. 2009

Montréal : Centre international de la commercialisation du Karité

D’un premier abord, cette idée doit vous paraître farfelue. Je vais tenter de vous démontrer en quelques lignes qu’au contraire, c’est une idée pleine de bon sens. Tout d’abord pourquoi un Centre international voué è la commercialisation du Karité? Pour valoriser cette ressource et s’assurer que les retombées vont profiter aux productrices du Sud et non aux intermédiaires du Nord. En ce moment, l’essentiel du commerce international du Karité se fait par des entreprises qui achètent les amandes brutes au Sud et les revendent au Nord. Ainsi, l’essentiel de la plus-value échappe aux productrices qui en ont pourtant grand besoin.

Depuis quelques années, et ce dans toute l’Afrique de l’Ouest, un travail considérable se fait avec le soutien des organismes de coopération internationale afin que les femmes qui récoltent le karité se regroupent en coopératives et transforment sur place les amandes en beurre de Karité de qualité. Les progrès sont remarquables à tel point qu’il est devenu urgent de développer les marchés pour écouler les stocks qui commencent à s’accumuler. Le marché local est limité par le faible pouvoir d’achet de ses consomateurs. Par contre, le marché des cosmétiques naturels et éthiques connait une croissance rapide. Mais pour y avoir accès, les coopératives doivent se regrouper. Un organisme international de commercialisation pourrait être un excellent catalyseur pour accélérer ce processus qui tarde à se concrétiser sur le terrain.

Or, tous s’entendent sur le fait que cet organisme devrait être situé à proximité des marchés qu’il a pour mission de développer. Le premier marché mondial est actuellement, et de loin, celui de l’Amérique du Nord. Comme les pays producteurs sont en majorité francophones, la candidature de Montréal commence à faire du sens. C’est aussi un lieu de communication naturel avec l’Europe et les déplacements y sont moins couteux qu’au départ de l’Afrique. De plus, le Québec a développé une expertise internationalement reconnue en développement d’activités commerciales à des fins sociales. Finalement, des ONG basées à Montréal soutiennent depuis longtemps des projets reliés au Karité. Bref, Montréal c’est LA place pour faire ce truc !

Cet organisme serait plus qu’un bureau de vente. Il pourrait développer des partenariats avec les acteurs du marché. Valoriser l’utilisation du Karité avec des outils de communication moderne. Favoriser le développement de la recherche. Suivre l’évolution des marchés en étant à l’affut des opportunités qui peuvent se présenter. Faire le lien avec les productrices afin de bien amarrer offre et demande. L’aide gouvernementale et les fondations privées pourraient être sollicitées afin de contribuer et faire ainsi en sorte que l’essentiel des revenus des ventes soit retourné aux productrices.

Grâce aux nouvelles technologies de communication, les représentantes des coopératives des pays producteurs seraient au cœur de la gouvernance de l’organisme. Ainsi, celui-ci ne serait pas une entité du Nord venant en aide à des populations du Sud, mais plutôt une véritable organisation internationale où les coopératives du Sud siègent d’office et auraient un rôle essentiel pour la prise de décision. À ma connaissance, ce concept novateur serait une première et marquerait un saut qualitatif pour le concept du commerce équitable. J’en ai parlé à plusieurs responsables de coopératives au Mali et ils sont enthousiastes face à ce projet. « Voilà ce dont nous avons besoin » m’ont-ils dit.

Alors, ai-je réussi à vous convaincre que cette idée n’est pas farfelue, mais plutôt un beau projet? Peut-être même aimeriez-vous contribuer à sa réalisation ?

J’attends vos commentaires sur le blogue ou encore par courriel : danielberthiaume@gmail.com
Posted by Picasa