9 oct. 2009

Le karité nous appelle

Les vertus thérapeutiques du Karité sont de plus en plus reconnues et ce partout dans le monde. Le potentiel économique de la mise en valeur de cette ressource pour le développement rural de la région la plus pauvre du monde est évident. Le karité, arbre phare du berceau de l’humanité, nous appelle.

L’arbre à Karité est omni présent ici. Il pousse naturellement et couvre toute la région de la savane située entre celle du Sahel, plus désertique, à celle des forêts équatoriales, plus au sud. Il est présent dans les nombreuses zones sauvages mais également sur les terres cultivées. Comme ici l’agriculture n’est pas mécanisée, pratiquement tout se fait à la pioche, ils ne font pas obstacles. Mieux, ils procurent de l’ombre car le soleil est de plomb.

Le beurre de karité est également omniprésent dans la vie de tout Africain de l’Ouest. Bébé, il sera beurré abondamment pour être protégé du froid et autres agresseurs. Puis tout au long de la vie, on s’en induira le corps pour soigner les rhumes, cicatriser les plaies, soulager les démangeaisons ou quoi encore. On s’en sert également comme gras de cuisson et on l’utilisait auparavant comme huile à lampe. Il est également partie intégrante de rituels animistes, encore bien vivants malgré l’omniprésence de l’Islam qui est souvent un mince vernis sur des croyances ancestrales bien enracinées.

Du début à la fin, tout ce qui concerne le ramassage et la transformation du karité est une affaire de femmes. Comme nous l’avons vu dans le texte sur le code de la famille, en milieu rural elles doivent assumer 80% des dépenses de la famille. Pour plusieurs d’entre elles, le revenu généré par le Karité représentera plus de 50% de leur revenu annuel.

Le beurre de Karité est extrait de l’amande du fruit par un long et fastidieux processus. Tout d’abord le fruit qui contient la noix dans laquelle on retrouve l’amande, n’est pas cueilli mais plutôt ramassé au sol. Le fruit est alors bien mur, mais le ramassage doit se faire rapidement, 2 ou 3 jours au plus après la chute du fruit et ce avant le début de la germination.

Par après, le fruit devra être dépulpé, comme le café, et la noix séchée. Puis les noix seront bouillies afin de stopper le processus de germination. Puis séchés de nouveau. Cette étape représente une difficulté majeure à laquelle sont confrontées les productrices. Le fruit arrive à maturité en pleine saison des pluies, appelé ici l’hivernage. Le séchage peut prendre entre 6 et 20 jours et parfois les femmes ne disposent pas de surface suffisante pour étendre leurs noix. Pendant ce temps, elles doivent les protéger au moment des averses. Ce n’est pas évident, car elles ont de multiples autres responsabilités. Une fois bien séchées, les noix peuvent se conserver pendant plus d’un an si les conditions d’entreposage sont bonnes, c'est-à-dire dans un endroit sec et aéré.

Traditionnellement, lorsque la femme a besoin d’argent, elle ira retirer quelques noix pour les transformer en beurre qu’elle ira vendre par après au marché local. C’est une tâche considérable. La première étape consiste à retirer l’amande de la noix en les écrasant avec un mortier. Puis, elles en retirent les écailles. Ensuite, elles trient les amandes afin d’éliminer celles qui sont pourries, moisies ou racornies. Celles qui seront retenues seront lavées puis séchées. Après, elles seront concassées au mortier puis torréfiées dans une poêle sur un feu de bois. Puis le tout sera moulu au moulin du village et la poudre qui va en résulter devra être refroidie avant l’étape cruciale : le barattage. C’est l’étape magique qui fera que cette poudre foncée que l’on mélangera avec de l’eau se coagulera en un beurre beaucoup plus pâle après une trentaine de minute d’un brassage vigoureux et spectaculaire (voir la vidéo).

Ce beurre qui flottera sur les résidus sera ensuite lavé et rincé plusieurs fois. Finalement, c’est la cuisson qui débarrassera le beurre des derniers résidus et éliminera les dernières traces d’eau. Cette bouillie sera refroidie et une huile flottera sur les résidus. On la retirera et on la filtrera. Une fois refroidi, elle va se figer et on obtient finalement un beau beurre onctueux couleur crème.
Tout ce processus peut se faire en une journée. Mais comme les femmes ont de multiples tâches qu’elles peuvent difficilement déléguées, il leur faudra en général 2 jours. Une femme pourra alors produire 10 kg de beurre qu’elle vendra autour de 400 FCFA le Kilo (un peu moins d’un $). Elle devra assumer des frais (bois de chauffe, eau, mouture) d’environ 200 FCFA. Donc, elle obtiendra un revenu net d’environ 3,800 FCFA (9 $). Si elle avait vendu tels quels les 33 kg de noix nécessaires à cette production, elle aurait alors eu un revenu de 2640 FCFA (6$). La plus value de ce travail sera d’environ 3 $. C’est modeste, mais n’oublions pas que la majorité de la population vit ici avec moins de 1,25$ par jour et qu’il y a peu d’alternatives.

On comprendra alors tout l’intérêt de valoriser cette ressource pleine de potentiel et qui procure des revenus à plus de 3 millions de femmes au Mali seulement. C’est ainsi que sont nées les Coopératives de productrices.
À suivre….
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